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Un coup d’État peut-il être légitime ? ( Par Roger-Claude Liwanga, Chercheur à l’université Harvard, professeur de droit et de négociations internationales à l’université Emory)

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Guinée, Mali, Tchad… Les putschs se multiplient en Afrique. Pour certains, ils sont toujours injustifiables. Pour d’autres, ils peuvent être un mal nécessaire…

Depuis août 2020, l’Afrique a recensé quatre coups d’état militaires, en Guinée, au Tchad et au Mali. Au sein de l’opinion publique africaine (notamment sur les réseaux sociaux et dans les médias traditionnels), les avis sont partagés sur le recours à cette pratique. Avec cette question, parmi celles qui suscitent le débat : un coup d’État peut-il être éthiquement juste ?

Compte tenu de son caractère illicite, tout coup d’État devrait être considéré comme éthiquement injustifié, et ce peu importe la noblesse des motivations de ses auteurs. Un avis soutenu par les adeptes de la philosophie dite d’éthique « formaliste » ou « déontologique ». Développée par le philosophe allemand Emmanuel Kant au XVIIIe siècle, elle est basée sur le respect indéfectible de la loi ou de l’ordre constitutionnel.

Plusieurs nations africaines ont promulgué des constitutions prohibant tout recours à la force pour accéder au pouvoir. De ce point de vue, il ne peut y avoir aucune justification morale pour renverser militairement un gouvernement en place, même si ce régime est dictatorial ou ne répond pas aux besoins essentiels de ses citoyens.

L’Union africaine (UA) semble suivre cette ligne : lors de tentatives de coup d’État dans ses pays-membres, elle exige souvent le retour à l’ordre constitutionnel sous peine de sanctions. L’organisation a par exemple suspendu le Mali en juin 2021, après un second coup d’État militaire dans le pays en l’espace de neuf mois. Et le Congolais Félix Tshisekedi, président en exercice de l’UA, a presque immédiatement dénoncé le putsch du 5 septembre en Guinée.

Mal nécessaire ?

Mais d’autres analystes estiment que, dans certaines circonstances, un coup d’État peut se justifier d’un point de vue éthique. Pour eux, la prise du pouvoir par la force est un mal nécessaire si elle vise à mettre fin à un régime dictatorial, à renverser un gouvernement non démocratique qui n’assure pas le bien-être de ses citoyens ou à chasser des dirigeants qui modifient les lois nationales pour s’éterniser aux manettes du pays. Eux se basent sur « l’éthique utilitariste », développée aussi au XVIIIe siècle par le philosophe anglais Jeremy Bentham, selon laquelle un acte illicite peut être légitime s’il tend à maximiser le bien-être collectif. De Mobutu à Mamady Doumbouya en passant par Blaise Compaoré, les putschistes africains ont d’ailleurs toujours argué avoir agi pour le bien du peuple. Mais à quel peuple se réfèrent-ils ?

Autre question, plus importante encore, selon quels critères un coup d’État militaire peut être considéré comme socialement juste ?

Selon la chercheuse canadienne Nadine Olafsson, spécialiste de l’étude des conflits, plusieurs éléments doivent être pris en compte : l’engagement des putschistes à céder le pouvoir à une autorité civile dans un bref délai après des élections libres et équitables, la prise de mesures d’intérêt général par le gouvernement militaire, l’absence de représailles contre les dignitaires du régime renversé et l’ampleur du soutien de la population aux nouveaux maîtres du pays.

Les récents coups d’État en Guinée ou au Mali répondent-ils à ces critères ? Il est encore très tôt pour répondre…

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Katanda : Quand le pacte de paix révèle son pouvoir mystique

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La localité de Katanda est le théâtre d’événements pour le moins insolites depuis la signature d’un pacte de paix et de vivre-ensemble historique entre les communautés Bena Muembia, Bena Kapuya et Bena Nshimba. Cet accord, fruit de longues négociations et de la médiation des grands chefs coutumiers de la région, visait à mettre un terme aux tensions et aux conflits intercommunautaires qui ont, par le passé, assombri la vie de ces populations.

Si le pacte a engendré une atmosphère d’harmonie et de fraternisation inédite, des incidents récents ont suscité l’étonnement et l’interprétation au sein de la communauté, certains y voyant la manifestation d’un pouvoir mystique inhérent à cet engagement solennel.

Les faits rapportés, bien que distincts, ont en commun leur caractère singulier et leur survenance dans la période consécutive à la signature du pacte de paix. Le premier incident concerne une femme de la communauté Bena Nshimba qui s’était rendue à Katabua, une localité voisine, dans le but de collecter du bois mort. Selon les témoignages recueillis sur place, alors qu’elle déterrait des maniocs dans un champ qui ne lui appartenait pas, elle a été victime de la morsure simultanée de trois serpents.

Le second incident, tout aussi étrange, s’est déroulé à Dipumba. Un jeune homme, dont l’appartenance communautaire n’a pas été officiellement précisée mais qui, selon certaines sources locales, serait lié à l’une des communautés autrefois en conflit, se serait accidentellement tiré dessus en manipulant une arme à feu. L’arme en question aurait été initialement apportée dans le but d’une attaque, vestige des anciennes animosités intercommunautaires.

Ces deux incidents, survenus dans un laps de temps relativement court après la signature du pacte de paix, sont perçus par une partie significative de la population locale comme étant plus que de simples coïncidences. Certains habitants y voient une manifestation tangible du pouvoir mystique qui sous-tend l’accord de paix et de vivre-ensemble, auquel ont participé les plus hauts dignitaires coutumiers de la région. L’interprétation dominante suggère que ces événements pourraient être des avertissements ou des conséquences liés au non-respect des termes tacites ou explicites du pacte, ou encore des manifestations de forces spirituelles veillant au maintien de la nouvelle harmonie.

Mike Tyson Mukendi / CONGOPROFOND.NET

 

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