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Forêt : En RDC, le bois d’oeuvre crée la pauvreté (enquête)

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La République démocratique du Congo dispose du deuxième grand massif forestier au monde après le Brésil. Estimée à près de 155 millions d’hectares, la superficie forestière de la RDC attise les industriels du bois, de par le monde. Cependant, l’exploitation du bois d’œuvre dans plusieurs provinces forestières, surtout par les entreprises chinoises pose un réel problème, à cause notamment de la corruption à tous les niveaux, la non application de la loi forestière et l’impunité.

RDC et le bois de la pauvreté, est une enquête que nous avons menée dans les provinces de l’Equateur et de la Tshuapa. Elle met en lumière les bavures, la complicité et les entraves à la loi que commettent les entreprises chinoises dans cette partie du pays.

Par Nelphie MIE avec la participation de Francis Mbanzulu, Elisée Boweya et Eric Bombayo
Le long parcours du bois congolais vers la Chine a commencé en 2018, dans la cité de Bokatola, Territoire d’Ingende, Province de l’Equateur.

Malgré le moratoire, Maniema Union 2 a réussi à obtenir des concessions forestières et des permis de coupe industrielle du bois. Cela a été rendu possible grâce au soutien des autorités polico-militaires, sous le règne de l’ancien  Président Joseph Kabila.

En 2019, après multiples dénonciations, cette entreprise a décidé de changer de nom. Elle devient Long Xin Sarlu. En 2020, elle va se scinder en deux entreprises, l’une appelée Congo Sun Flower Development, et l’autre Congo King Bashing Forestry Developpement (COKIBAFODE).

Ces deux géants chinois exploitent notamment dans les provinces de l’Equateur, Tshuapa, Mongala et Sud Ubangi. Elles sont à la base de controverses, car ne respectant pas les lois qui organisent le secteur d’exploitation industrielle du bois dans le pays.

Entreprises au-dessus de la mêlée

C’est fait à dessein », explique un expert forestier.

Malgré les recommandations formulées à l’endroit de cette entreprise, les inspecteurs découvrent de nouvelles illégalités.
« Par rapport aux données collectées sur le terrain, nous avons remarqué que certaines grumes sont dépourvues d’empreintes de marteaux forestiers ; ce qui signifie que ces arbres ont été coupés sans que les empreintes de marteaux forestiers y soient apposés. Pourtant, ces instruments permettent de différencier les arbres qu’il convient d’abattre de ceux qu’il faut conserver.

Nous avons aussi vu des grumes avec un diamètre d’exploitation inférieur au minimum de 60 cm recommandé par l’Etat congolais », déplore un inspecteur.

Ce faisant, c’est toute la traçabilité du bois congolais qui est rendue largement impossible, permettant ainsi à ces entreprises chinoises d’exporter leur bois illégal en toute impunité.

Outre ces illégalités constatées, les entreprises chinoises exploitent souvent en dehors de leurs assiettes annuelles des coupes, sans en être inquiétées. Selon un rapport de mission réalisée par les inspecteurs forestiers en 2019, et que nous avons consulté, l’entreprise chinoise a opéré une exploitation anarchique en dehors de l’AAC 3 du secteur des Ekonda à Itipo, Territoire de Bikoro, pour se retrouver dans l’AAC 2 et ACC1 dans les villages Bongale, Bowele, Bokenge et Bombembe dans le secteur de Bokatola, Territoire d’Ingende.

Un autre rapport consulté indique que toujours dans le même territoire, la zone autorisée pour l’exploitation est représentée par l’AAC 5.

C’est bien cette assiette annuelle de coupe qui a été présentée dans les clauses sociales de cahier des charges et pour lequel deux permis (2020 et 2021) ont été délivrés. Pourtant l’AAC 5 ne figure pas dans le plan de gestion provisoire élaboré par COKIBAFODE.

Cependant, le ministère de l’environnement sous Claude Nyamugabo a autorisé à la société de couper sur cette AAC inexistante. https://environews-rdc.net/wp-content/uploads/2023/01/Les-permis-donnes-sur-une-AAC-inexistante.pdf
Selon des experts, cette exploitation qui s’effectue sans une bonne planification, ne favorise pas la réalisation des projets communautaires négociés dans les clauses sociales de cahier des charges.

Pour la communauté de Bombwanza par exemple, les infrastructures (4 écoles et un centre de santé) se sont limitées à 28 % de réalisation, pourtant la société déclare n’avoir plus de compte à rendre à cette communauté.

Plusieurs sites que nous avons visités nous ont révélé leur secret. C’est du bois coupé et abandonné dans la forêt, ou enfoui dans le sol. A Bongale, secteur de Bokatola, ce sont des dizaines de grumes abandonnés par ces entreprises.

Ce qui frise simplement un sabotage de la forêt congolaise.

« Ils ont abandonné du bois dans la forêt, ça fait déjà plus de neuf mois qu’ils sont partis d’ici », indique un habitant de ce village, qui nous fait visiter le lieu.

A Losanganya, dans le Territoire de Bolomba, l’exploitation forestière de COKIBAFODE n’a pas dérogé à la règle.

Les dégâts causés à l’environnement sont perceptibles.

À la quête du bois, les engins chinois n’ont épargné ni arbre ni feuillages. Sur leur passage, même les lieux sacrés de communautés sont profanés.

« Ici, c’était les cimetières. C’est un lieu sacré que les chinois ont profané à la recherche du bois », regrette Rio Lindongo, habitant du village Bangala. « Depuis nos ancêtres, le cimetière est un lieu sacré.

On y fait rien, même pas le ramassage des chenilles. Mais, les chinois ont profané ce lieu ».

Des déclarations erronées

Plus de trois rapports de mission de contrôle réalisés dans la même période par les inspecteurs forestiers de Mbandaka et ceux de Kinshasa ont relevé le tripatouillage des chiffres et de fausses déclarations de volume de bois coupé.

Ces rapports renseignent que les entreprises ne disposent pas de carnets d’abattage.

Le permis que détient COKIBAFODE  par exemple, donne un volume de 1 370 m3, et pourtant la société a coupé 7.213,690 m3.

 

« Nous ne sommes pas contre l’exploitation. Nous voulons juste que ça se fasse légalement, nos forêts doivent contribuer au développement de notre communauté », a informé Joseph Bolongo, chef de projet. « Nous sommes optimistes.

Nous travaillons avec une tranche de la population et nous avons apporté des kits de sensibilisation.

Nous espérons qu’avec  cette méthode, nous parviendrons à organiser  les communautés afin que l’exploitation puisse contribuer tant soit peu à leur bien-être».

Une fois documentées, ces illégalités servent de plaidoyers de la société civile pour obtenir du gouvernement central de coercitions pour pousser les entreprises chinoises à se conformer à la loi. Petit à petit, le projet de GASHE a fait évoluer la cause des communautés.

Pour la première fois, un citoyen chinois arrêté en flagrance a été jugé et condamné par les Cours et tribunaux de Mbandaka, avant d’être expulsé du sol congolais.
«  La force reste à l’État. Il faut qu’il reste vigilant », a déclaré Gérard Iloko, coordonnateur  provincial de la nouvelle société civile de la Tshuapa.

En attendant, Jean-Marie Loko se souviendra toujours de cette nuit sombre, où il a vu sa jambe partir sous le coup de balle, sans espoir, d’en obtenir une quelconque réparation.

« Je demande à la justice congolaise de poursuivre les chinois. Ils doivent me dédommager. Regardez mon état, comment puis-je m’occuper de mes femmes et de mes enfants ? », a-t-il conclu.

Reportage réalisé avec l’appui de la Rainforest Journalism Fund en partenariat avec Pulitzer Center.


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COP29/Baku : La voix de l’Afrique s’unifie sur la résilience climatique à Johannesburg 

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Alors que la menace du changement climatique pèse de plus en plus lourdement sur le continent africain, les principales parties prenantes se réuniront les 7 et 8 mai prochains à Johannesburg pour une table ronde cruciale. Organisée par l’African Risk Capacity (ARC) et ses partenaires, cette rencontre vise à développer une vision africaine unifiée sur les enjeux d’adaptation et de résilience face au dérèglement climatique.

“L’Afrique doit apporter ses propres solutions innovantes pour atténuer les impacts dévastateurs des changements climatiques, en particulier pour les populations les plus vulnérables”, a déclaré un porte-parole de l’ARC. Les développements issus de la COP27, comme la décision historique d’établir un Fonds pour les pertes et dommages, donnent un nouvel élan aux efforts des pays en développement, durement frappés par cette crise mondiale.

La table ronde entend capitaliser sur cette dynamique pour préparer la COP29 de Bakou. “C’est l’occasion pour l’Afrique de parler d’une voix claire et décisive sur ces questions vitales de résilience climatique”, selon les organisateurs. Les objectifs sont multiples : articuler les besoins du terrain, identifier les défis et opportunités, partager les leçons des expériences passées, développer des solutions innovantes et explorer les pistes de collaboration.

Sont attendus des représentants de haut niveau des Etats africains, d’organisations régionales comme l’Union africaine, ainsi que des agences onusiennes, bailleurs de fonds, experts techniques, entreprises privées, ONG et groupes de jeunes. Une large mobilisation reflétant l’urgence de la situation pour le continent.

“L’avenir de l’Afrique se joue aujourd’hui face au changement climatique, affirme la même source. Cette table ronde doit permettre de dégager une feuille de route claire et des ressources adéquates pour renforcer notre résilience et notre capacité d’adaptation.”

Claudine N. I.


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Bientôt le magazine CONGO PROFOND dans les kiosques à journaux : Simplicité, Pertinence et Découverte