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CONGO HOLD-UP : l’enquête qui accuse le Clan Kabila !

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La fuite de plusieurs millions de documents et transactions bancaires à la BGFIBank révèle l’ampleur des détournements de fonds publics. Parmi les principaux bénéficiaires présumés, il y a Joseph Kabila, l’ancien président de la République démocratique du Congo, et son premier cercle. Le premier volet de cette enquête, appelée Congo Hold-up, porte sur la société Sud Oil et ses sociétés satellites. Elles ont reçu pour plus de 90 millions de dollars d’argent public. Enquête de Mediapart avec EIC et ses partenaires, dix-sept médias dont RFI et cinq ONG.

« C’est quoi, Sud Oil ? ». Il n’y a pas un gardien du 43 avenue Tombalbaye qui le sache. Pourtant, en 2014, cette discrète société de droit congolais de distribution de produits pétroliers s’installe à ce numéro et dans toute la concession d’immeubles et de garages qu’il abrite sur l’une des principales artères commerçantes de la Gombe, en plein cœur de Kinshasa, capitale de la République démocratique du Congo (RDC). « Non, ici, ce n’est pas Sud Oil, c’est chez Kabila », corrige le gardien. Dans ce grand pays d’Afrique centrale, souvent qualifié de scandale géologique, la population n’a rien raté des scandales liés au pillage de ses ressources. Ce que les Congolais ignorent souvent, c’est par quels mécaniques et montages ils ont été spoliés du bénéfice de ces richesses. Ils en subissent les conséquences au quotidien. Plus de 70% de Congolais vivent toujours avec moins de deux dollars par jour.

Entrée de l’ensemble des bâtiments qui abritent Sud Oil à Kinshasa, en République démocratique du Congo (RDC). © PPLAAF

Pour comprendre comment ces détournements publics ont été opérés, pendant neuf mois, dix-neuf médias internationaux coordonnés par le réseau European Investigative Collaborations (EIC), dont Radio France Internationale (RFI) et cinq ONG ont analysé la plus grande fuite de données bancaires d’Afrique, appelée Congo Hold-up. Il s’agit de plus de 3,5 millions de documents et de millions de transactions du groupe BGFI et de sa filiale en RDC couvrant une période de dix ans, obtenus par l’ONG Plateforme pour la protection des lanceurs d’alerte en Afrique (PPLAAF) et le site d’information français Mediapart.

Comme au Gabon et au Congo-Brazzaville, la BGFIBank RDC est la banque du président. En 2010, quand cette enseigne s’installe à Kinshasa, la sœur de Joseph Kabila, Gloria Mteyu, reçoit gratuitement 40% du capital. En 2013, Francis Selemani, son frère adoptif, devient le directeur général de BGFI RDC. Ils conserveront ces positions et avantages au moins jusqu’en mai 2018.

L’analyse des documents Congo Hold-up montre comment la famille Kabila et ses associés ont reçu, avec la complicité de la BGFI, 138 millions de dollars des caisses de l’État entre 2013 et 2018. Ces détournements présumés de fonds publics sont l’équivalent de 250 000 années de salaire moyen en RDC.

À cela s’ajoutent des dépôts colossaux d’argent : 33 millions de dollars déposés en liquide, et 72 millions d’origine inconnue qui ont transité par le compte de la BGFI à la Banque centrale du Congo (BCC).

Sur le total de cet argent public, Sud Oil joue un rôle important, car cette société a encaissé, avec ses sociétés satellites, plus de 150 millions de dollars, dont 28 millions de cash et 92 millions d’argent public sur leurs comptes à la BGFI.

Règle #1 : Prendre le contrôle d’une société existante

Sud Oil a été créée en 2008 par Pascal Kinduelo, un homme d’affaires proche de la famille Kabila, qui devient président du conseil d’administration de la BGFIBank RDC deux ans plus tard. M. Kinduelo possédait 60% de ses parts. Les 40 autres pour cent étaient détenus par ses filles Mina et Lyvie Kinduelo.

Au départ, Sud Oil est une véritable société de distribution de pétrole : elle possède un petit réseau de sept stations-service. Mais en 2011, elle vend ces stations et semble entrer en sommeil. Mais elle connaît ensuite une deuxième vie, quand la famille Kabila en prend le contrôle.

Officiellement, selon un procès-verbal, le 4 octobre 2013, se tient une assemblée générale extraordinaire de Sud Oil. Les actionnaires déclarés à cette occasion sont Aneth Lutale, femme de Francis Selemani Mtwale (80%) et Gloria Mteyu (20%). Au début de la séance, les gérants sont encore Pascal Kinduelo et l’une de ses filles. Mais quand l’assemblée se termine, ils ont démissionné et sont remplacés par un certain David Ezekiel.

” alt=”” aria-hidden=”true” />Les statuts de Sud Oil en 2013.
© GRC

Les nouveaux statuts de Sud Oil ne sont adoptés que l’année suivante. Mais le fidèle et discret collaborateur tanzanien de Francis Selemani Mtwale, David Ezekiel prend déjà la main. Les documents Congo Hold-up établissent qu’à travers lui, son patron, le directeur général de la BGFIBank RDC contrôle effectivement Sud Oil.

L’analyse des comptes de Sud Oil à la BGFI montre qu’entre 2013 et 2018, le frère adoptif de Joseph Kabila a personnellement reçu au moins 10 millions de dollars de Sud Oil, utilisés notamment pour acheter des biens immobiliers en Afrique du Sud et aux États-Unis. Son collaborateur, M. Ezekiel, va retirer, à lui tout seul, près de 53 millions de dollars en liquide des comptes de la société.

Il y a beaucoup de bénéficiaires de Sud Oil. Elle a également servi à faire transiter dix millions de dollars versés par des entreprises étrangères, dont une partie pourrait provenir de pots-de-vin, comme nous le révélerons lors des prochains volets de notre enquête.

Les fonds détournés semblent également avoir profité au duo d’hommes d’affaires Alain Wan et Marc Piedboeuf, associés de Joseph Kabila. Inconnus du grand public, ces deux hommes contrôlent un empire économique en RDC. Ils ont notamment été actionnaires puis gestionnaires des Grands Élevages du Bas-Congo, l’immense domaine agricole du président Kabila.

Le 25 mai 2016, Marc Piedboeuf a retiré 640 000 dollars en liquide sur le compte de Sud Oil à la BGFI grâce à un chèque émis par la société en sa faveur. Le 26 juin 2016, André Wan, le fils d’Alain, a retiré à son tour 1,1 million de dollars en cash de la même manière.

Interrogés à ce propos, Alain Wan et Marc Piedboeuf ont refusé de répondre, indiquant, par la voix de leur avocat, que nos questions contiennent des informations « pour la plupart mensongères » et sont motivées par l'” intention manifeste de nuire”.

Le 3 novembre 2021, avant même la publication de cet article, ils ont déposé une plainte pour « dénonciation calomnieuse » contre nos partenaires Mediapart et De Standaard auprès d’un procureur général de Kinshasa, lui demandant de « diligenter une commission rogatoire auprès des juridictions belge et française vu qu’il y a péril en la demeure ».

Au cours de cette enquête, nous nous sommes aussi heurtés à un mur du silence. Les principales personnalités mises en cause, Joseph Kabila, Francis Selemani Mtwale, Gloria Mteyu, Pascal Kinduelo, David Ezekiel n’ont pas souhaité répondre à nos questions.

Règle #2 : Se choisir un siège social

À l’automne 2013, Sud Oil lance sa première opération depuis la prise de contrôle de la famille Kabila : l’acquisition de l’ancien immeuble d’ATC, un concessionnaire automobile appartenant à Philippe de Moerloose, riche homme d’affaires belge très proche de Joseph Kabila, qui l’avait lui-même acheté deux ans plus tôt à son propre groupe. C’est cet ensemble immobilier qui est situé au 43 avenue Tombalbaye à la Gombe.

Des courriels montrent que Francis Selemani Mtwale semble négocier lui-même la vente avec Philippe de Moerloose pour le compte de Sud Oil, alors qu’il n’a officiellement aucune fonction dans la société. « Cher Francis, j’espère que tu vas bien. Sois sûr que

que nous allons conclure ce deal et que je n’ai aucun problème, parce que je te fais confiance. C’est le plus important », lui écrit ainsi l’homme d’affaires belge le 14 octobre 2013.

M. de Moerloose réclame 12 millions de dollars, à payer sur son compte suisse à la banque UBS de Genève : 5 millions tout de suite, et le solde échelonné sur un an. Sud Oil n’a pourtant, à ce moment-là, qu’un peu plus de 100 000 dollars sur son compte. Mais pour Francis Selemani Mtwale, frère du président de la République et directeur général de la BGFI RDC, ce n’est pas un problème.

Le 25 novembre 2013, jour de la vente, la Banque centrale du Congo (BCC) vire 5,5 millions de dollars sur le compte de Sud Oil à la BGFI. Les sept millions restant sont financés par une garantie bancaire octroyée par la BGFI, sous forme de douze traites mensuelles que Sud Oil doit rembourser. La société a scrupuleusement honoré ses engagements, grâce à des mystérieux dépôts d’argent liquide effectués avant chaque échéance.

Interrogé sur ces courriels, Philippe de Moerloose assure que ses « échanges avec M. Selemani concernaient » uniquement la « garantie de paiement » octroyée par la BGFI « et non pas la transaction immobilière ». Il explique aussi avoir « à l’époque exigé une copie du registre des actionnaires » de Sud Oil, et que le document qui lui a été présenté « ne renseignait aucun membre de la famille Kabila ».

Dossier à suivre…

RFI & MEDIAPART


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Processus de Luanda : lancement à Goma d’un mécanisme renforcé de vérification du respect du cessez-le-feu

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Sous la facilitation de l’Angola, un mécanisme de vérification visant à veiller au respect du cessez-le-feu et détecter les différentes violations qui pourraient être commises par le Rwanda et/ ou la République démocratique du Congo a été lancé ce mardi 5 novembre 2024.

La cérémonie y relative a été organisée à la grande barrière de Goma, en province du Nord-Kivu, dans l’est de la République démocratique du Congo. La partie R.D. Congolaise a été représentée par la ministre d’État, ministre des Affaires étrangères, Thérèse Kayikwamba Wagner, et son homologue Olivier Nduhungirehe, pour la partie Rwandaise.

Le but est celui d’atteindre les objectifs de l’accord de Luanda, pour la paix dans cette partie Est de la RDC.

« Nous avons tenu à présenter les nouveaux membres du mécanisme avancé aujourd’hui lors de cette cérémonie. Ce qui est très important est dans mon discours et ceux de mes collègues de la RDC est de voir la situation évoluer dans la région des Grands lacs et le respect du cessez-le-feu. Car ceux qui sont dans l’optique de prendre les armes sont dans un mauvais chemin. Nous allons faire de notre mieux pour la réussite du nouveau mécanisme », a assuré Téte António, facilitateur et ministre angolais des Affaires étrangères.

Ont pris également part à ces assises, la représentante spéciale du Secrétaire général des Nations-Unies en RDC, Bintou Keita, le gouverneur de la province du Nord-Kivu, le corps diplomatique, les services techniques de la RDC et du Rwanda, les représentants des confessions religieuses ainsi que des délégués de la Société civile du Nord-Kivu.

Willy Theway Kambulu/CONGOPROFOND.NET


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Bientôt le magazine CONGO PROFOND dans les kiosques à journaux : Simplicité, Pertinence et Découverte