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Tribune : Le «Blitzkrieg infrastructurel» de Tshisekedi réussira-t-il à rassurer ses électeurs avant 2023? ( Par Roger-Claude Liwanga, chercheur à l’université Harvard, professeur de droit et de négociations internationales)

_Félix Tshisekedi s’est lancé dans plusieurs projets de construction rapide d’infrastructures. Les résultats sont pour l’instant insatisfaisants en raison de détournements de fonds présumés, de l’absence de coordination et de faiblesse des pilotages._
_Le 24 janvier prochain, Félix Tshisekedi célébrera le 3e anniversaire de son accession au pouvoir. Il ne lui restera alors plus que deux ans de son quinquennat avant qu’il ne sollicite un second mandat auprès de ses électeurs dont nombreux attendraient encore la concrétisation de certaines promesses qui leur ont été faites pendant la campagne électorale en 2018. Conscient de cette situation, Tshisekedi se serait lancé dans un « Blitzkrieg infrastructurel » pour rassurer ses électeurs avant les futures échéances électorales de 2023. Cependant, quelques analystes s’interrogent si Tshisekedi parviendrait à ses fins au regard du retard accumulé dans l’exécution de ces projets socio-économiques. Dans l’affirmative, ce serait avec quels collaborateurs ?_
Indubitablement, depuis sa prise de pouvoir, Tshisekedi aurait manifesté une volonté de réhabiliter et/ou construire des routes, des écoles et des hôpitaux pour tenir certaines de ses promesses électorales. Pour y arriver, il semblerait mettre en place un plan de construction rapide d’infrastructures, que j’appellerai « Blitzkrieg infrastructurel ». Le Blitzkrieg, terme allemand signifiant « guerre éclair », est une tactique visant à remporter une victoire rapide ou décisive à travers un engagement localisé et limité dans le temps. Cette tactique fut par exemple utilisée par l’armée allemande pendant la Seconde Guerre mondiale. Aujourd’hui, elle est employée dans le domaine de la diplomatie pour dénouer des crises politiques ou dans le domaine de la santé publique pour éradiquer des pandémies.
Mais qu’est-ce que cette tactique a à faire avec la construction ou la réhabilitation des infrastructures en RDC ? Comment Tshisekedi la mettrait-elle en œuvre ?
Un programme perturbé
Dans le contexte politique congolais, Tshisekedi n’hésite pas à rappeler à son gouvernement « d’accélérer la mise en œuvre de projets à impacts rapides et visibles ». En mars 2019, il a lancé un programme d’urgence de construction et de réhabilitation d’infrastructures de base dit de « Cent jours » dont le budget était évalué à plusieurs centaines de millions de dollars et qui consistait à ériger des infrastructures routières, immobilières, scolaires et sanitaires dans plusieurs villes du pays et ce pendant les cent premiers jours de son mandat. Malheureusement, ce programme a connu plusieurs problèmes dans son implémentation, dont notamment le détournement des fonds y alloués pour lequel Vital Kamerhe, le directeur du cabinet de Tshisekedi à l’époque, fut même condamné.
Malgré les difficultés recensées lors du programme de « Cent jours », Tshisekedi s’embarqua dans un autre projet de construction dit « Tshilejelu » en mars 2021 concernant les ex-provinces de Kasaï-Oriental et Kasaï-Occidental. Bien entendu, à l’instar du programme des Cent jours », les travaux du « Projet Tshilejelu » n’auraient pas avancé comme prévu et il y aurait aussi des soupçons de détournement des fonds.
Agacé par ces insuccès, Tshisekedi aurait même averti ses collaborateurs lors du récent conseil des ministres de janvier 2022 « qu’il ne tolérera pas de trouver » des travaux inachevés dans le projet de construction en cours dans l’ancienne province de l’Équateur.
Absence de coordination
Sûrement, ces différents « fiascos » n’ont pas laissé indifférents les analystes de la politique congolaise. D’aucuns se demandent ce qui ne va pas en réalité dans l’exécution des projets présidentiels. Le problème serait-il lié aux profils des exécutants de ces différents projets ? Les modestes résultats obtenus de ces travaux n’étaient-ils pas prévisibles ?
Bien sûr, le président Tshisekedi a lui-même répondu à ses questions lors de son discours à la Nation devant le Congrès en décembre 2021 au cours duquel il a reconnu « l’absence de coordination » et des « faiblesses de pilotage » dans le chef des personnes chargées d’implémenter ces différents projets sociaux.
Quelques autres observateurs blâmeraient Tshisekedi lui-même en arguant qu’il serait partiellement responsable de l’inexécution des projets puisque, selon eux, le président congolais aurait lui-même choisi ses propres collaborateurs pour piloter ces différents programmes.
Toutefois, comme cela s’observe quand on utilise le Blitzkrieg, l’absence de coordination parmi les acteurs impliqués peut rendre ineffectif le succès qu’on pourrait espérer de l’emploi de cette tactique.
Pour conclure, les deux ans restants dans son quinquennat seraient-ils suffisants pour permettre à Tshisekedi de tenir ses promesses à ses électeurs au vu du retard déjà accumulé ? Rien n’est impossible, mais attendons de voir.
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Haut-Uélé : Des Chinois arrêtés pour exploitation illégale sur le site de Kibali Gold Mine, Louis Watum réaffirme la souveraineté minière de la RDC

En mission d’itinérance dans la province du Haut-Uélé, le ministre national des Mines, Louis Watum Kabamba, a fait, ce lundi 6 octobre, une découverte pour le moins troublante sur le périmètre d’exploitation de Kibali Gold Mine, la plus grande entreprise aurifère opérant légalement en République démocratique du Congo.
Sur ce site, des ressortissants chinois, dépourvus de tout titre ou autorisation officielle, exploitaient frauduleusement l’or congolais, en violation flagrante des lois nationales et sous le regard impuissant de certaines autorités locales.
Le ministre n’a pas tardé à réagir. Sur place, il a ordonné l’arrestation immédiate des contrevenants et la saisie de leurs engins, soulignant la volonté ferme du gouvernement de mettre fin à l’exploitation illicite des ressources naturelles.
Cette opération coup de poing s’est déroulée en présence du gouverneur de province Jean Bakomito, de plusieurs députés provinciaux ainsi que du Directeur général de Kibali Gold Mine, Cyrille Mutombo Cibanda.
« La force reste à la loi », a déclaré Louis Watum, avant de rappeler que la souveraineté minière constitue un pilier fondamental de la souveraineté nationale.
« Les ressources du sous-sol congolais doivent profiter d’abord au peuple congolais, dans la transparence et le respect des règles », a-t-il insisté.
Une question de souveraineté et de dignité nationale
Au-delà du simple acte de répression, cette intervention du ministre s’inscrit dans un combat plus large pour la souveraineté économique de la RDC, longtemps fragilisée par des pratiques d’exploitation illégale menées par certains opérateurs étrangers, parfois avec la complicité interne.
La présence d’acteurs non autorisés sur un site stratégique comme Kibali Gold Mine met en lumière les défis persistants liés à la sécurisation des zones minières, mais aussi à la maîtrise des circuits d’exportation de l’or congolais, souvent détourné au détriment du Trésor public.
En réaffirmant l’autorité de l’État sur le secteur, Louis Watum envoie un signal fort : la RDC n’entend plus être spectatrice de la prédation de ses ressources.
Cette opération marque un tournant symbolique dans la reconquête de la souveraineté minière, un enjeu majeur pour le développement durable et la dignité du peuple congolais.
Tchèques Bukasa/CONGOPROFOND.NET