Politique
L’opposition congolaise : Entre l’étrange silence et les attentes du peuple
Alors que la République Démocratique du Congo s’attend à une opposition vigoureuse et éclairée après les élections tumultueuses de décembre 2023, l’étrange silence des figures clés comme Katumbi, Fayulu et Mukwege laisse le pays dans l’expectative.
Pendant ce temps, le camp présidentiel accumule les controverses, des cumuls ministre-député en dépit des décisions de la cour constitutionnelle à la récente sortie présidentielle déconcertante sur divers sujets brûlants. Pendant ce temps, des rumeurs de révision constitutionnelle pour permettre à Félix Tshisekedi de se représenter en 2028 commencent à circuler.
L’absence de réaction de l’opposition congolaise soulève des questions cruciales sur son rôle dans le maintien de l’équilibre démocratique et l’empêchement des dérives politiques. Dans une période où la RDC a plus que jamais besoin d’une opposition forte pour guider le débat public et garantir que les bons choix soient faits pour le peuple, ce mutisme devient une énigme politique. Alors que des sujets sensibles comme le protocole UE-Rwanda et l’affaire Stanys Bujakera liée à la mort de Chérubin Okende restent sans réponse de leur part, l’opposition congolaise semble manquer à son devoir de contrôle et d’opposition constructive.
Dans un climat politique aussi tendu et incertain, l’attitude de l’opposition congolaise, ou son absence d’attitude, risque de compromettre non seulement le débat public mais aussi l’avenir démocratique du pays tout entier. À un moment où la voix de l’opposition est cruciale pour assurer la transparence, la responsabilité et la démocratie, son silence semble être une trahison des attentes du peuple congolais et une opportunité manquée pour faire valoir les intérêts et les droits de tous les citoyens.
Il n’est pas encore trop tard pour Katumbi, Fayulu et Mukwege de se ressaisir. La RD Congo s’honorerait à avoir un exécutif dans l’exercice réel du pouvoir et une opposition dans la contestation des projets discutables mais aussi dans la proposition d’un autre chemin. Sinon tout va s’user. Tout va passer. L’honneur du peuple congolais va s’éteindre. Les vertus vont disparaître et notre avenir commun sera compromis.
TEDDY MFITU
Polymathe, chercheur et écrivain / Consultant senior cabinet CICPAR
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À la Une
Guerre du M23/Rwanda : Des milliers de personnes fuient les combats en direction de Goma et au-delà
Les violents affrontements autour de la localité de Sake, dans l’est de la RDC, qui opposent l’armée congolaise, appuyée par ses alliés locaux, et le M23, soutenu par le Rwanda, poussent des milliers d’habitants de la région à fuir les combats. Si la plupart vont chercher refuge à Goma, le chef-lieu de la province du Nord-Kivu situé à seulement une vingtaine de kilomètres de là, d’autres préfèrent aller au-delà et franchir la frontière avec le Rwanda. Reportage.
À Goma, en RDC, l’angoisse est palpable sur la route principale qui relie les quartiers de Ndosho et de Katindo. Des colonnes de déplacés circulent à pied, à moto ou en bus en direction du chef-lieu de la province du Nord-Kivu. Désespérées, Alice et Kanyere racontent leur calvaire. « Il y a de nombreuses détonations et des avions qui bombardent là d’où nous venons. Il y a aussi beaucoup de militaires sur la route. Tout le monde s’enfuit ! », confie la première. « Beaucoup de bombes explosent et les balles sifflent. Nous avons dû quitter les huttes de notre camp, témoigne la seconde, dépitée, avant de poursuivre : je n’ai pas de famille à Goma. Il faut que le gouvernement termine la guerre ! »
Âgé d’une trentaine d’années, Haguma Banga marche, lui, avec un matelas sur la tête. Après avoir fui Sake, il est toujours sans nouvelle de sa famille. « Je ne sais pas où sont ma femme et mes cinq enfants. Ce serait un miracle de les retrouver », se désole-t-il.
A l’hôpital CBCA Ndosho, le personnel soignant s’active pour recevoir les blessés qui affluent également en masse, comme Mariam Kashindi, 22 ans, qui a quitté Sake en urgence après avoir reçu un éclat d’obus dans le bras. « Nous avions commencé à fuir, nous étions devant le marché de Mubambiro quand ma fille a été touchée par une bombe dont les éclats m’ont atteint, raconte-t-elle avant de poursuivre : nous fuyons le M23. J’ai trois enfants. L’un a été blessé, quant à l’autre, je ne sais pas où il est ».
« Nous étions un groupe de femmes, plusieurs sont mortes sur le coup »
Un peu plus loin, Neema Jeannette pleure allongée sur un lit. Elle a été touchée par une explosion alors qu’elle se trouvait avec un groupe d’amies. « Une bombe est tombée sur nous. Nous étions un groupe de femmes, plusieurs sont mortes sur le coup. Moi, je suis la seule survivante. Je remercie le CICR de m’avoir prise en charge à l’hôpital », sanglote-t-elle.
Cheffe de la sous-délégation du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) au Nord-Kivu, Miriam Favier explique que l’établissement a été contraint d’activer ses quatre blocs opératoires en raison de l’afflux de blessés. « Depuis ce matin, plus de 70 patients sont déjà arrivés et ce n’est pas fini. C’est assez inquiétant », déplore-t-elle.
Si, à Goma, les autorités militaires comme la société civile appellent au calme, des écoles et plusieurs boutiques ont toutefois fermé leurs portes, tout comme l’Institut français, qui a décidé de suspendre temporairement ses activités. Les billets de tous les spectacles annulés seront intégralement remboursés, explique la structure dans un communiqué.
« Même ici, on vient d’entendre un obus tomber »
Anticipant une nouvelle dégradation de la situation sécuritaire, certains habitants ont, quant à eux, décidé de prendre les devants et sont passés au Rwanda voisin, où ils ont trouvé refuge dans la ville frontalière de Rubavu pour la plupart. « Mon mari habite ici, il m’a dit de le rejoindre pour fuir la panique qui s’empare de la ville de Goma », déclare ainsi Amina, une valise à la main et accompagnée de ses deux enfants.
Innocent, lui, a trouvé une chambre dans un hôtel. « Il y avait foule au niveau de la douane, c’était plein à craquer, rapporte-t-il. Alors, quand on a des enfants en bas âge, on ne va pas attendre la dernière minute pour partir, car on ne sait pas vraiment ce qu’il va se passer, on n’est pas sur la ligne de front. Même ici, on vient d’entendre un obus tomber, alors imaginez : quand on est à Goma, c’est comme si l’explosion avait lieu dans la parcelle d’à côté. Voilà pourquoi on a décidé de partir » poursuit celui-ci.
Comme beaucoup d’autres habitants du chef-lieu du Nord-Kivu, Innocent prévoit de rester à Rubavu, le temps de voir comment évolue la situation, avec l’espoir de pouvoir rentrer chez lui le plus rapidement possible.
RFI
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