Politique
Jean-Marc Kabund-a-Kabund : Un paradoxe politique en quête de rédemption
Dans le tumulte politique de la République Démocratique du Congo, émerge une figure complexe : le Premier Vice-Président honoraire de l’assemblée nationale, Jean-Marc Kabund-a-Kabund. Héritier d’une histoire tourmentée des luttes politiques et marquée par l’accession démocratique au pouvoir, il incarne à la fois la lutte et la résilience face à un pays meurtri par des décennies de conflits et de corruption.
Depuis sa cellule de prison à Makala, le Président Kabund-a-Kabund se présente comme un recours à ce qu’il avait déjà qualifié d’échec, un rempart contre les dérives du pouvoir en place. Son optimisme inébranlable, symbolisé par le slogan de son parti « Demain sera meilleur », résonne comme un appel à l’espoir dans un pays en proie au désespoir.
Pourtant, derrière cette façade se cache un homme politique au caractère affirmé, parfois perçu comme arrogant et dogmatique. Sa certitude d’avoir raison sur tout le monde, y compris au sein de son propre camp, a suscité des critiques et semé la discorde. Il dit toujours que la résilience est sa capacité à naviguer dans les torrents de la vie.
Son passage de la majorité présidentielle à l’opposition a été marqué par des mises en garde contre le manque d’humilité et la déconnexion des élites politiques du régime du Chef de l’état congolais Félix Tshisekedi Tshilombo vis-à-vis du peuple. Kabund-a-Kabund incarne à la fois la force de la conviction et la fragilité de l’orgueil, une dualité qui intrigue autant qu’elle dérange.
Malgré les incompréhensions et les oppositions, Kabund-a-Kabund reste un stratège politique redoutable, un organisateur méticuleux prêt à affronter les épreuves pour atteindre ses objectifs. Sa plasticité et sa confiance en lui sont à la fois sa force et sa faiblesse, dessinant un avenir incertain mais résolument ambitieux.
Alors que certains prédisent sa chute politique, Jean-Marc Kabund-a-Kabund se prépare déjà pour l’échéance de 2028, prêt à défier ses détracteurs et à poursuivre sa quête de dépassement des clivages pour un avenir meilleur pour la RDC. Bien que le pays soit plein de souffrance, il est aussi plein de résilience nécessaire pour la surmonter.
Dans ce portrait contrasté, l’énigme Kabund-a-Kabund reste entière, entre icône de la résistance et paradoxe politique en quête de rédemption. Le pouvoir est une action, et le principe électif est la discussion. Il n’y a pas de politique possible avec la discussion en permanence. Jean-Marc Kabund en fin politique sait très bien que la politique est un jeu de pouvoir.
De ce jeu, il en ressort que les passions se mêlent à l’argent, les idéaux deviennent illusoires et le bien commun se perd au vent. Il a avec lui l’avantage d’être un politicien qui a su convaincre par le passé. Sa traversée actuelle de désert est un capital politique pour le rebond. Quiconque ne veut l’embarras du scrupule ne choisit guère le pouvoir.
TEDDY MFITU
Polymathe, chercheur et écrivain / Consultant senior cabinet CICPAR
Actualité
Kisangani : Quand les victimes de la guerre de 6 jours se rebellent contre la corruption au FRIVAO
Un quart de siècle après le drame, les survivants handicapés refusent le silence et interpellent l’État sur la justice qui leur échappe encore._
Sous le soleil pesant de la Tshopo, ce week-end, ils sont venus, béquilles et cicatrices en avant, porter une même plainte, celle de la dignité bafouée. Les victimes de la guerre de 6 jours, ce conflit sanglant de juin 2000 qui avait opposé les armées rwandaise et ougandaise au cœur de Kisangani, ne demandent plus la pitié. Elles réclament des comptes.

Devant le ministre d’État en charge de la Justice, Guillaume Ngefa, un groupe de survivants a brisé le silence. Ces hommes et femmes, marqués à vie par la guerre, dénoncent aujourd’hui un nouveau fléau : la corruption au sein du Fonds pour la Réparation et l’Indemnisation des Victimes de l’Agression Ougandaise (FRIVAO). « Nous sommes venus voir le ministre pour lui montrer une situation indécente qui se passe ici à la Tshopo », confie Moïse Ndawele, amputé de la jambe droite depuis cette guerre.
« Les agents du FRIVAO nous réclament 500 dollars américains pour être enregistrés sur les listes d’indemnisation. Et si tu n’as pas cet argent, ils te proposent d’y figurer en échange de la moitié de ton indemnité. »
Un témoignage glaçant, partagé par de nombreuses autres victimes.
Ces pratiques présumées ternissent le visage d’un programme censé incarner la justice réparatrice voulue par l’État congolais. Pour ceux qui ont tout perdu, l’attente d’une compensation tourne à la désillusion, voire à l’humiliation.
Face à la gravité des faits rapportés, le ministre Guillaume Ngefa a promis d’agir. Selon les plaignants, il aurait assuré qu’il portera le dossier au Conseil des ministres et qu’il s’engage à « remettre de l’ordre » dans cette affaire. Une promesse saluée avec prudence par les victimes, qui redoutent que le dossier ne s’enlise dans les méandres administratifs, comme tant d’autres avant lui.
Mais à Kisangani, l’heure n’est plus à la résignation.
Les survivants de la guerre de 6 jours, dont beaucoup vivent aujourd’hui dans la pauvreté et l’oubli, veulent croire que leur combat pour la reconnaissance et la justice trouvera enfin un écho réel au sommet de l’État. « Nous ne voulons pas de faveur, seulement la justice. Nous avons assez attendu », lance l’un d’eux, le regard ferme.
À travers leur voix s’exprime toute une génération de Congolais meurtris, témoins d’un passé sanglant mais toujours debout, décidés à ne plus être les oubliés de l’histoire.
Tchèques Bukasa/CONGOPROFOND.NET
