Analyses et points de vue
Didier Budimbu : Le roi des illusions et le stade des désillusions

Dans un pays où les routes sont plus poreuses qu’un vieux filet de pêche et où les hôpitaux manquent de matériel de première nécessité, Didier Budimbu, ministre des Sports et Loisirs, a décidé de frapper un grand coup : annoncer la construction d’un stade de 60 000 places à la place Sainte Thérèse à N’djili.
La nouvelle de la construction du nouveau stade, révélée lors de la dixième réunion ordinaire du conseil des ministres, a non seulement de quoi susciter l’étonnement, mais aussi l’indignation. Il est presque comique de voir un ministre, dans un pays qui peine à gérer des infrastructures déjà existantes, se lancer dans un projet aussi monumental qu’inutile.
Alors que le Stade des Martyrs et le Stade Tata Raphael mais aussi celui du 24 Novembre croulent sous l’inaction et sont à peine exploités, Didier Budimbu choisit de rêver grand. Mais quel est le but réel de cette annonce ? Ne transparaît-il pas à grosses gouttes la création d’un éléphant blanc, symbole d’une gestion calamiteuse et d’un gaspillage éhonté des fonds publics ?
Il est difficile de croire que cette initiative émane d’une réelle volonté d’améliorer le sport en RDC. Au contraire, elle semble être une opportunité en or pour les détournements, la surfacturation et la corruption qui gangrènent ce pays. On ne peut s’empêcher de se poser la question : avec quel argent compte-t-il financer cette folie ?
Les promesses de montages financiers mirifiques ne sont souvent que des chimères, et l’expérience passée nous enseigne que les projets de cette envergure se soldent généralement par des échecs retentissants. De plus, alors que le pays est en proie à une crise économique et sociale sans précédent, la priorité ne devrait-elle pas être donnée à des projets qui améliorent la vie de tous les Congolais ?
Plutôt qu’à un simple monument à la gloire d’une gestion politique défaillante, cette annonce ne fait que masquer les véritables enjeux auxquels la RDC est confrontée. Dans un contexte où les championnats nationaux sont à peine maîtrisés, où les infrastructures sportives sont laissées à l’abandon, Didier Budimbu choisit de faire rêver le peuple avec un projet pharaonique.
Plutôt que de construire des stades, peut-être serait-il plus judicieux de construire une véritable stratégie pour le développement du sport congolais, avec des bases solides et un respect des ressources publiques. Il est urgent que le ministre prenne conscience que le peuple congolais mérite bien plus qu’un simple stade.
Il mérite une vision, une stratégie et des actes concrets en faveur du développement du sport, mais aussi de l’ensemble des secteurs vitaux de la nation. Le temps des illusions et des promesses vides est révolu. Les Congolais n’ont que faire d’un nouveau stade si cela signifie sacrifier leur avenir sur l’autel de la corruption et de la mauvaise gestion.
Didier Budimbu devrait méditer sur le fait que, pour gagner la confiance du peuple, il faut d’abord s’attaquer aux problèmes réels et urgents qui minent la RDC. Construire un stade peut sembler séduisant sur le papier, mais dans la réalité, c’est un projet qui pourrait bien s’avérer être un nouveau coup d’épée dans l’eau.
La RDC a besoin de plus qu’un simple espace pour accueillir des matches : elle a besoin d’un véritable changement. Celui qui n’a pas de vision doit se contenter au moins de suivre les pas des autres. Quelle est la vision de Didier Budimbu pour le sport congolais à l’horizon 2050 ? Qui en a déjà entendu parler ?Quelle en est la planification nationale ? Quand le seau déborde, il est temps de changer le récipient.
TEDDY MFITU
Polymathe, chercheur et écrivain / Consultant senior cabinet CICPAR
Analyses et points de vue
Gangstérisme administratif du DG Simon Siala Siala à l’IMNC : patrimoine culturel congolais en danger

Selon plusieurs sources, Simon Siala Siala a quitté l’institution pour une mission, laissant un pouvoir intérimaire apparemment non officialisé à sa directrice générale adjointe, Juliette Mbambu Mughole. Ce vide décisionnel semble avoir été le point de départ des tensions actuelles. De façon particulièrement troublante et constatée par la police et des huissiers de justice, l’IMNC est devenu un bien privé de son DG.
Des informations font état d’ordres donnés à certains agents très proches de lui qui ont orchestré la forfaiture de ne pas travailler en attendant le retour physique du directeur général, comme si l’institution devait s’arrêter en son absence et que son autorité ne pouvait être exercée par délégation. Cette conception personnalisée du pouvoir est aux antipodes des principes de continuité du service public.
La convocation d’une Assemblée Générale sans avoir préalablement obtenu l’accord formel de la Ministre de tutelle et du Conseil d’administration de l’IMNC constituerait la dernière provocation en date. Cette initiative unilatérale, prise en l’absence de toute validation hiérarchique, illustrerait un mépris total pour les procédures établies et la structure de gouvernance de l’institution. Face à cette situation, la réaction du personnel n’a pas tardé.
Un mouvement de protestation, bien que compréhensible, a eu pour effet de détourner l’attention des agissements du principal responsable de cette pagaille institutionnelle. Pendant ce temps, les autorités de tutelle, la Ministre de la Culture, des Arts et du Patrimoine et le Secrétaire général, sont restées d’un silence assourdissant, malgré les appels publics lancés par le personnel pour qu’elles interviennent.
Cette inertie face à une crise ouverte interroge sur la volonté politique de faire respecter l’État de droit au sein des institutions culturelles. Certains agents connus de justice et syndicalistes ont manifesté leur ras-le-bol devant le siège de l’institution à Lingwala. Leurs revendications, cependant, semblent avoir été judicieusement canalisées : elles se sont concentrées sur des griefs contre la Directrice Générale Adjointe, Juliette Mbambu Mughole.
Elle est accusée de “dérives” pour avoir tenté de réviser des textes légaux en l’absence du DG Simon Siala Siala. Ce qui est évidemment faux. L’IMNC est la seule institution en RDC qui refuse tout audit. C’est ce point qui a mis le feu aux poudres. Au-delà de la personne de Simon Siala Siala, cette crise met en lumière un problème systémique de gouvernance au sein de l’IMNC, une institution qui a connu par le passé de longues périodes de tensions similaires.
Les pratiques autoritaires, le contournement des procédures collégiales et la personnification du pouvoir transforment le musée, qui devrait être un sanctuaire de la mémoire collective, en une arène de luttes intestines. Et curieusement, un nom revient toujours lorsqu’il y a désordre à l’Institut des Musées Nationaux du Congo depuis au moins 4 ans soit comme DGA ou soit comme DG. C’est Simon Siala Siala.
Il est grand temps que les autorités de la RDC réagissent avec la fermeté requise pour mettre un terme à ce “gangstérisme administratif”. Le riche patrimoine culturel congolais et les générations futures méritent mieux qu’une institution otage des ambitions personnelles et du mépris des textes qui la régissent. N’oublions pas l’essentiel, l’institution doit être préservée à tout prix et non un quelconque mandataire DG soit-il.
TEDDY MFITU
Polymathe, chercheur et écrivain / Consultant senior cabinet CICPAR