Actualité
Congo/Brazza: gouvernement et intersyndical de l’université Marien Ngouabi trouvent un terrain d’entente

Les négociations entre les délégués du collège intersyndical de l’université Marien Ngouabi et le premier ministre Clément Mouamba, ont abouti le 28 novembre dernier à des conclusions salutaires pour la reprise des cours à l’université qui est en grève depuis bientôt trois mois.
L’Etat promet déjà le payement immédiat du salaire du mois de juin 2018.
Au cours de cette réunion, le premier ministre a pris, au nom des membres du gouvernement, le ferme engagement de respecter les conclusions aux quelles ces négociations sont parvenues.
Elles portent sur la mise à la disposition du personnel universitaire d’une enveloppe spéciale immédiate destinée à couvrir les charges suivantes : le payement immédiat du salaire du mois de juin 2018 ; le payement des heures diverses dues au titre des années académiques 2017-2018 ; le versement de la subvention de fonctionnement ; le versement d’une subvention spéciale pour l’organisation des examens ; la poursuite des négociations avec la tutelle pour le règlement des mois impayés ; le payement des salaires au même rythme que les agents de la fonction publique et, enfin, la levée de la grève et de la reprise des cours conformément aux mécanismes syndicaux.
Pour Didier Ngalebaye, porte-parole de l’intersyndical de l’université Marien Ngouabi, la grève étant déclenchée en assemblée générale, l’issue de ces conclusions sera connue après la rencontre avec la base qui a lieu le 29 du novembre 2018.
«Nous sommes les délégués syndicaux. Nous ne pouvons donc rien décider dans la salle [de la Primature]. Nous allons rendre compte à notre assemblée générale qui est la base. C’est elle qui avait lancé la grève et c’est à elle décider de la levée de cette grève», a-t-il déclaré en se félicitant du bon déroulement de cette réunion avec le premier ministre.
Il a souhaité par ailleurs à la création par le gouvernement des conditions de la reprise des cours à Marien Ngouabi.
Les documents contenant les conclusions ont été signés du côté du collège intersyndical par Philippes Kala Matongo, Jacques Moussiéssié et Diedier Ngalebaye et du côté du gouvernement par le vice-premier ministre, ministre de la fonction publique et de la sécurité sociale Firmin Ayessa, Calixte Nganongo, ministre des finances et du budget et, Anatole Collinet Makosso, ministre de l’Enseignement primaire, secondaire et de l’alphabétisation représentant le ministre de l’enseignement supérieur en mission.
Achille Schillains, CONGOPROFOND.NET/Correspondant à Brazzaville
À la Une
Corridor de Lobito, PGII, AGOA : à Luanda, Kinshasa veut sortir de l’ombre

La participation du président congolais Félix Tshisekedi au 17ᵉ Sommet des affaires États-Unis-Afrique, qui s’est ouvert ce 23 juin à Luanda, dépasse la simple logique de présence protocolaire. Elle marque une inflexion stratégique dans la diplomatie économique de la République démocratique du Congo (RDC), qui cherche à redéfinir sa place dans la nouvelle cartographie industrielle du continent.
Ce sommet, organisé par le Corporate Council on Africa, réunit plus de 1 500 décideurs publics et privés. Il s’inscrit dans un contexte où les rapports entre puissances et pays africains connaissent une redéfinition accélérée, sous l’effet conjugué des rivalités sino-américaines, des pressions climatiques et de la reconfiguration des chaînes de valeur mondiales.
Changement de posture : la RDC ne veut plus subir la mondialisation, elle veut la façonner
La prise de parole attendue de Félix Tshisekedi sur le projet du Corridor de Lobito révèle une ambition politique claire : transformer les infrastructures régionales en leviers d’influence géoéconomique. Ce corridor ferroviaire, qui vise à relier les provinces minières de la RDC et de la Zambie aux ports angolais, incarne bien plus qu’un chantier logistique. Il symbolise une volonté de rupture avec un modèle extractif qui a longtemps cantonné le pays à un rôle périphérique.
À travers ce projet, soutenu par le Partnership for Global Infrastructure and Investment (PGII) — la réponse américaine à l’initiative chinoise Belt and Road — Kinshasa tente de s’imposer comme un point nodal dans la stratégie d’approvisionnement occidental en minerais critiques, tout en défendant une industrialisation localisée.
Cette démarche s’inscrit dans une double logique : sécuriser les débouchés tout en renforçant la capacité du pays à générer de la valeur ajoutée sur place. En d’autres termes, la RDC aspire à passer du statut de fournisseur de matières premières à celui de co-producteur dans les chaînes globales.
Une fenêtre diplomatique à exploiter avec précaution
Les discussions bilatérales de Tshisekedi, notamment avec l’entourage du président américain Donald Trump, interviennent dans un climat d’incertitude commerciale. L’accord AGOA (African Growth and Opportunity Act), instrument central des relations économiques USA-Afrique depuis plus de deux décennies, arrive à expiration en septembre 2025. Son avenir reste flou, et les signaux politiques en provenance de Washington oscillent entre maintien sélectif et refonte structurelle.
Dans ce contexte, la RDC tente de capitaliser sur une présence active et ciblée : elle se positionne comme un interlocuteur stable, doté d’un agenda industriel affirmé, dans un environnement régional encore marqué par des instabilités récurrentes. Ce positionnement est d’autant plus stratégique que les États-Unis cherchent à rééquilibrer leur influence face à la Chine, qui vient d’annoncer une quasi-suppression des droits de douane pour plusieurs produits africains.
Un test grandeur nature pour la crédibilité de Kinshasa
Mais cette ambition ne peut se contenter d’annonces. Elle appelle des résultats tangibles, à commencer par la capacité du gouvernement congolais à structurer ses filières industrielles, sécuriser ses réformes foncières et fiscales, et garantir un cadre juridique attractif pour les investisseurs.
Le sommet de Luanda sert donc de test : il ne s’agit plus simplement d’attirer l’attention, mais de démontrer la solidité d’un projet économique cohérent. La RDC devra prouver qu’elle peut sortir du cycle bien connu « ressources-extraction-exportation » pour entrer dans un schéma « ressources-transformation-partage de valeur ».
Vers un repositionnement structurel ou simple opération de communication ?
L’activisme économique de la RDC, visible à Luanda, traduit une prise de conscience : celle que l’avenir du pays ne réside pas dans le volume de ses exportations brutes, mais dans sa capacité à intégrer les standards et les exigences des chaînes de production mondiales.
Il reste à savoir si cette dynamique s’inscrira dans la durée ou si elle demeurera circonstancielle, dictée par le calendrier électoral américain, la volatilité des cours des métaux, ou les aléas internes congolais. Ce qui est certain, en revanche, c’est que la RDC s’est engagée dans une reconfiguration stratégique qui ne laisse plus de place à la passivité. Elle veut compter. Il lui faudra maintenant convaincre.
Franck Tatu