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Mini-Sommet de Goma: travaux des experts ( 9-10 sept.), réunion des ministres (11 sept.) et sommet des chefs des Etats ( 13 septembre)

Dans sa communication du vendredi 04 septembre 2020, le Président de la République Félix Antoine Tshisekedi a informé les membres du Conseil des Ministres qu’un mini-sommet se tiendra à Goma entre lui-même et les Chefs d’Etat ougandais, rwandais, burundais et angolais.
A en croire des sources présidentielles, ce mini-sommet de Goma va s’ouvrir ce mercredi 9 septembre par des travaux des experts des pays participants. Ceux-ci vont clôturer leurs tâches le jeudi 10 septembre pour laisser place à la réunion des ministres qui aura lieu le vendredi 11 septembre 2020.
La date du 13 septembre est retenue comme celle du sommet des chefs des Etats.
D’après David JOLINO MAKELELE, ce mini sommet va se pencher sur trois thèmes à savoir :
• la Paix et la sécurité dans la région ;
•les relations diplomatiques et politiques entre ces Etats ;
• la relance des activités économiques dans le contexte actuel de lutte contre la Covid-19.
Au regard des thèmes qui y seront développés, le Conseil des Ministres, à l’initiative du Président de la République, a chargé notamment les Ministres ayant l’Intérieur, Gilbert Kankonde, les Affaires Etrangères, Marie Tumba Nzeza; la Coopération Internationale, Guillaume Manjolo; la Défense, Aimé Ngoy Mukena, et le Commerce extérieur, Jean-Lucien Bussa, dans leurs attributions de mettre ensemble les éléments devant constituer le dossier sur la position de la RDC par rapport à ses voisins.
Notons que ce mini-sommet va se tenir au moment où des voix se sont levées pour exiger le départ de l’ambassadeur du Rwanda en RDC.
Il est reproché au diplomate rwandais de nier le rôle de son pays dans les différents massacres perpétrés à l’Est de la RDC, notamment à Kasika dans le Sud Kivu.
En effet, dans un tweet, supprimé après la réaction des internautes congolais, le diplomate rwandais avait déclaré que parler de plus de 1000 morts à Kasika alors qu’on ne cite que deux noms, n’est qu’une propagande. Tout en qualifiant de calomnie le fait d’avancer que ce sont des militaires rwandais qui avaient tué des personnes à Kasika et ailleurs en territoire de Mwenga dans la province du Sud Kivu.
MUAMBA MULEMBUE CLÉMENT/CONGOPROFOND.NET
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Valentin Yves Mudimbe s’en est allé, mais sa parole demeure : l’Afrique orpheline d’un géant de la pensée

Ce jour, la République Démocratique du Congo, l’Afrique et le monde intellectuel viennent de perdre un monument. Valentin Yves Mudimbe, philosophe, écrivain et penseur hors pair, s’est éteint aux États-Unis, laissant derrière lui une œuvre aussi dense que subversive, une parole aussi lucide qu’indomptable.
Né en 1941 à Jadotville (actuelle Likasi), en RDC, Valentin Yves Mudimbe fut l’un des intellectuels africains les plus influents du XXᵉ et du XXIᵉ siècle. Professeur émérite à l’Université Duke, anthropologue, linguiste et romancier, il a marqué les sciences humaines par sa critique radicale des épistémologies coloniales et sa déconstruction des discours dominants sur l’Afrique.
Son œuvre majeure, The Invention of Africa (1988), reste un texte fondateur des études postcoloniales. Mudimbe y démontre comment l’Afrique a été « inventée » par le regard occidental, à travers des catégories de savoir qui ont nié ses propres logiques de pensée. Pour lui, « l’Afrique n’existe pas en dehors des représentations qui la constituent », une thèse qui a révolutionné la manière d’appréhender le continent.
Yves Mudimbe n’était pas seulement un théoricien : c’était un penseur du soupçon, toujours en éveil face aux illusions des idéologies, qu’elles soient coloniales, nationalistes ou néolibérales. Dans L’Odeur du père (1982), il explore les contradictions des élites africaines post-indépendances, dénonçant leur aliénation mimétique. Son roman Entre les eaux (1973) questionne la tension entre engagement politique et spiritualité.
Il a révélé sa propre trajectoire de prêtre jésuite devenu philosophe laïc. Ses travaux sur Foucault, Derrida et les structuralistes européens en font un passeur exceptionnel entre les traditions intellectuelles africaines et occidentales. Pourtant, il refusait toute étiquette : « Je ne suis ni un afrocentriste, ni un occidentaliste. Je suis un penseur de la fracture, de l’entre-deux », disait-il.
Aujourd’hui, alors que l’Afrique est confrontée à de nouveaux défis – néocolonialismes économiques, crises démocratiques, guerres d’influence –, la pensée de Mudimbe reste d’une brûlante actualité. Son questionnement sur « les conditions de production du savoir africain » invite à repenser l’université, la recherche et les médias du continent. Il laisse derrière lui des disciples à travers le monde. Des chercheurs qui continuent de déconstruire les récits hégémoniques.
« Mudimbe nous a appris à douter, à interroger nos propres certitudes ». La RDC en deuil mais l’Afrique en héritage, conclut le polymathe, cet autre géant de la pensée post-coloniale. Le Congo pleure l’un de ses plus grands fils, mais son héritage est impérissable. Dans un pays souvent meurtri par l’amnésie historique, Yves Mudimbe rappelait que « la mémoire est un acte de résistance ».
Alors que les hommages affluent du monde entier – de Paris à Johannesburg, de Dakar à New York –, une certitude s’impose : Yves Mudimbe est mort, mais sa parole, elle, ne mourra jamais. « Les mots ne sont pas innocents. Ils portent en eux la violence de l’histoire. » — Valentin Yves Mudimbe
TEDDY MFITU
Polymathe, chercheur et écrivain / Consultant senior cabinet CICPAR