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Financement des partis politiques congolais ( Papy MAOTELA, analyste)

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Par le passé, j’ai été amicalement invité par un ami à exposer, sur base de la loi congolaise, le mode de financement des partis politiques. Et par ricochet, de leur proposer des solutions optimales pouvant améliorer leurs caisses.

D’abord, je tiens à préciser que je ne suis pas juriste de formation. Les éléments de réponse partagés dans cet article sont les fruits de mes recherches personnelles. Néanmoins, je serai heureux que les discussions sur le financement des partis politiques soient engagées sans détours, ni passion dans le respect de la législation en vigueur.

Ensuite, je ne suis ni adhérent, ni militant de quelque parti politique ou mouvement politique congolais que ce soit. Les réflexions partagées dans ce papier n’engagent que ma personne. Les critiques et remarques sont les bienvenues. Ces observations nous aideront à améliorer la qualité de notre réflexion.

Premièrement, la Constitution de la RDC, en son article 6, stipule « le pluralisme politique est reconnu en République Démocratique du Congo. Tout Congolais, jouissant de ses droits civils et politiques, a le droit de créer un parti politique ou de s’affilier à un parti de son choix.

Les partis politiques concourent à l’expression du suffrage, au renforcement de la

conscience nationale et à l’éducation civique. Ils se forment et exercent librement leurs activités dans le respect de la loi, de l’ordre public et des bonnes mœurs.

Les partis politiques sont tenus au respect des principes de démocratie pluraliste, d’unité et de souveraineté nationales.

Les partis politiques peuvent recevoir de l’État des fonds publics destinés à financer leurs campagnes électorales ou leurs activités, dans les conditions définies par la loi ».

Au regard de ce qui précède et pour se conformer à l’intention du Constituant, deux lois ont été édictées et promulguées pour donner vie aux partis politiques en vue de renforcer leur capacité juridique et de promouvoir l’exercice de leur fonction civique, vecteur de l’apprentissage patriotique.

Il s’agit de la loi No.04/002 du 15/03/2004 portant organisation et fonctionnement des partis politiques et de la loi No.08/005 du 10/06/2008 portant financement public des partis politiques. Ces deux lois constituent le socle contre lequel l’action républicaine des partis politiques s’appuie pour réaliser leurs objectifs politiques et citoyens.

Ainsi, la loi définit un parti politique comme une association des personnes physiques de nationalité congolaise qui partagent la même idéologie et le même projet de société, en vue de conquérir et d’exercer démocratiquement et pacifiquement le pouvoir d’État. Les partis politiques concourent à l’expression du suffrage, à la formation de la conscience nationale et à l’éducation civique. (Art. 2, loi No.04/002 du 15/03/2004).

Au vu de la loi, un parti politique appartenant à un individu ne peut exister et violerait les dispositions légales. Aussi, un parti politique à caractère ethno-tribal ou familial ne répond guère aux impératifs du législateur. Tout parti politique doit revêtir une casquette nationale et promouvoir la communion entre toutes les tribus de la République Démocratique du Congo. (Art. 5, loi No. 04/002 du 15/03/2004)

Au Congo, le choix d’appartenir à un parti politique est garanti par la Constitution et par les lois de la République. Manifestement, le fait ne pas être ni militant, ni membre d’un parti politique ne constitue nullement une infraction en droit congolais. Il faut aussi souligner que l’instauration d’un parti unique est prohibée par la Constitution (Art. 7).

Bien que le Constituant ait donné droit à tout citoyen de s’exprimer librement et d’exercer légalement ses idéologies politiques, le fonctionnement, l’organisation comme le financement des partis politiques sont réglementés par la loi.

Dans cet article, nous n’allons nous appesantir que sur le financement des partis politiques congolais.

Cela étant dit, il faut noter à présent que le législateur définit les ressources des partis politiques et des contraintes d’ordre administratif et fiscal auxquelles ces partis sont tenus à se conformer. Notamment, la tenue d’une comptabilité et d’un inventaire des biens meubles et immeubles conformément à la législation en vigueur.

Les ressources des partis politiques proviennent des cotisations de leurs membres ; des dons et legs ; des revenus réalisés à l’occasion des manifestations ou des publications ; des opérations immobilières et mobilières ; et des subventions éventuelles de l’État. (Art. 22, loi No. 04/002 du 15/03/2004)

La loi impose aussi à ces partis politiques à rendre public leur état financier et au cas échéant, à justifier, les sources de leur revenu. (Art. 21, loi No. 04/002 du 15/03/2004)

Les subventions éventuelles de l’État ne sont pas non plus un droit pour les partis politiques mais sont plutôt un des moyens, sous conditions d’éligibilité et des contraintes budgétaires, que l’État met à la disposition des partis politiques en vue de lutter contre la corruption et de renforcer la transparence financière dans la gestion des partis politiques.

La loi 08/005 du 10/06/2008 portant financement public des partis politiques définit les conditions d’éligibilité. En son art. 3, je cite : sans préjudice des dispositions des articles 7, 10 et 11 de la présente loi, tout parti politique doit réunir les conditions suivantes pour bénéficier des subventions de l’État :

  • Être régulièrement enregistré au Ministère ayant les affaires intérieures dans ses attributions ;
  • Avoir un siège connu et attesté par un titre de propriété ou par un contrat de bail ;
  • Disposer d’un compte bancaire ayant un solde créditeur d’au moins 2.500.000 FC (deux millions cinq cent mille francs congolais) ;
  • Tenir une comptabilité régulière et disposer d’un inventaire de ses biens meubles et immeubles et produire l’attestation fiscale du dernier exercice ;
  • Tenir compte de la parité homme/femme, lors de l’établissement des listes électorales ;
  • Introduire une demande écrite à la Commission interinstitutionnelle prévue aux articles 12 et suivants de la présente loi.

Il sied aussi de noter que ces conditions sont nécessaires mais nullement suffisantes. Car, la même loi, en son article 7, renforce les conditions suffisantes : La subvention est allouée aux partis politiques représentés au moins à une des assemblées délibérantes, proportionnellement au nombre de leurs élus.

Le stade tata Raphaël

Les assemblées délibérantes visées dans l’art. 7 sont :

– l’Assemblée nationale ;

– le Sénat ;

– l’Assemblée provinciale ;

– le Conseil Urbain ;

– le Conseil Municipal ;

– le Conseil de Secteur ou de Chefferie.

En analysant intrinsèquement les conditions d’éligibilité du financement public des partis politiques, il se dégage que seuls les partis ayant des sièges dans une des assemblées délibérantes peuvent solliciter auprès de l’État un financement, s’ils remplissent les conditions susmentionnées.

A cela, il faut aussi ajouter les contraintes budgétaires. Les fonds précités tiennent compte des impératifs du cadrage budgétaire et des priorités de l’État. C’est pourquoi, d’une part, le montant de la subvention à inscrire chaque année dans la Loi des finances pour contribuer aux dépenses de fonctionnement des partis politiques ne peut être ni inférieur à 0,5%, ni supérieur à 1% de la totalité des recettes à caractère national revenant à l’État et, d’autre part, la participation de l’État au financement des campagnes électorales à inscrire dans la Loi de finances de l’année qui suit l’organisation de chaque consultation électorale est fixée à 2% des recettes visées ci-dessus.(Exposé des motifs, loi No. 08/005 du 10/06/2008)

Il est à signaler que cette loi congolaise du financement public des partis politiques est une copie parfaite de la loi française de 1988 sur la transparence financière de la vie politique française. Dans cette loi, le législateur français n’accordait les revenus publics qu’aux partis politiques qui siégeaient à l’Assemblée Nationale et au Sénat. Cette loi de 1988 a été modifiée par celle de 1990, qui modifie le critère, et accorde des subventions publiques à tout parti politique qui remplit la condition suivante : avoir recueilli plus de 1 % des suffrages exprimés dans au moins cinquante circonscriptions.

A l’instar du financement public, la loi congolaise laisse aux partis politiques un boulevard des possibilités pour financer leurs activités politiques en recourant aux dons et legs intérieurs comme extérieurs. A la différence, il est interdit, sous peine de dissolution, aux partis politiques d’user des biens publics et des agents publics pour financer leur organisation.

Subsidiairement, le législateur interdit aussi aux partis politiques de bénéficier directement ou indirectement des fonds extérieurs provenant d’un état étranger. (Art. 24, loi No. 04/002 du 15/03/2004). Néanmoins, ils peuvent bénéficier des dons provenant des personnes étrangères ou des entreprises privées étrangères comme des entreprises off-shore, des mouvements citoyens étrangers ou des fonds de la diaspora. Aussi, ces fonds doivent être retracés fidèlement et reportés auprès du Ministère de l’Intérieur. (Art. 21, al. 2, loi No.04/002 du 15/03/2004)

Je me suis toujours inscrit en faux sur des allégations selon lesquelles les partis politiques ne seraient pas en mesure de financer leur administration parce que la majorité de la population vit sous le seuil de pauvreté.

Il suffirait volontiers, sans moindre effort, d’analyser les sources de financement des églises de réveil et de se rendre rapidement à l’évidence de la faiblesse de cet argumentaire et de la moisissure argumentative des tenants d’un tel discours.

Les églises de réveil récoltent les miettes auprès des pauvres et construisent des édifices impressionnants. D’ailleurs, leurs dirigeants, profitant de la naïveté et de la passivité mentale des certains compatriotes, mènent une vie de bohème !

A titre d’exemple, prenons la commune de Bandalungwa, dans la ville Kinshasa. Combien des bars et hôtels peut-on recenser dans cette commune ? A l’absence des chiffres officiels, nous pouvons aisément, à un clin d’œil, recenser des milliers.

Les Chinois et Indo-Pakistanais qui investissent dans nos cités, où trouvent-ils leurs clients ? Pourquoi certains d’entre eux préfèrent vivre dans le Mayombe ou dans la commune de la N’sele, qui sont des coins ruraux ? Simplement, parce qu’ils y trouvent du revenu. Si le commerce de détail, bien que réservé aux autochtones, ne procurait aucun profit, je doute qu’ils y accrocheraient tant.

Un parti politique qui n’arrive pas à générer du revenu, auprès de ses militants, souffre d’un manque de leadership doublé d’une absence criante de vision. Dans les partis politiques congolais, les membres ne cotisent généralement pas. Les partis politiques sont encore au stade tribal et familial. Il n’existe aucun débat contradictoire à l’interne qui puisse les aider à quitter ce stade embryonnaire des tribus vers des hauteurs incommensurables de la transformation de la société.

Je suis du même avis que le Professeur Omasombo, qui dit : « en Afrique, l’opposition a toujours été fragile. Il n’existe pas des vrais partis politiques au Congo hors pouvoir. Ce sont des associations conjoncturelles d’individus autour d’un leader (qui ne discute avec personne et laisse donc un vide quand il part) ; il n’y a pas d’idéologie. Les membres ne cotisent généralement pas ; c’est le chef du parti qui distribue l’argent aux militants. Cet argent vient aussi des membres riches et/ou des ministres et députés quand on en a eu. Le PALU est un cas extrême : suite aux élections de 2006, les ministres et députés ont dû reverser initialement 40% de leur salaire au parti, dont la caisse était aux mains de Madame Gizenga, sans contrôle. Ce montant a diminué par la suite. Quand tu es chef de parti, on vient te voir pour recevoir de l’argent ou un poste, pas pour parler doctrine. Et un parti qui n’a pas accès aux caisses de l’État a beaucoup des difficultés à maintenir sa cohésion. C’est ce qui rend les dirigeants politiques si facilement achetables ». (Interview dans Libre Afrique)

Le Professeur Omasombo a pu identifier avec une facilité et une intelligence remarquables les faiblesses qui minent les partis politiques congolais. Partant de son analyse, je me permets de me lancer dans un simple calcul marginal.

Il existe environs 2.4 millions (voire plus) d’utilisateurs actifs Facebook géolocalisés en RDC. Ces comptes appartiennent à des Congolais comme à des étrangers.

Prenons simplement 2% de cette base, soit 48. 000 utilisateurs. Actuellement, l’activation internet pour 1GB, par jour, coûte 100 unités, soit 1$ (un dollar américain) qui correspond à 1.640 FC (mille six cent quarante francs congolais). Si un parti politique arrive à convaincre ses membres à sacrifier un seul jour de connexion par mois, il peut gagner 48.000$(quarante-huit mille dollars américains) par mois, soit 576.000$(cinq cent soixante-seize mille dollars américains) l’année.

Par cette simple arithmétique, il est possible que les partis politiques congolais puissent enfler leurs caisses et financent leurs activités en recourant à l’épargne publique sans attendre le financement public. Pour y arriver, ils doivent être organisés, structurés et transparents. En plus, les militants et adhérents doivent s’approprier l’idéologie du parti, et réclamer des comptes à leurs dirigeants. A ce jour, malheureusement, les partis politiques sont plutôt des caisses de résonance tribale et se vendent au plus offrant lors des négociations politiques.

Aussi, la question qui reste à poser est d’où les partis politiques congolais tirent leur revenu pour prendre en charge leurs leaders ? Quel parti politique congolais publie régulièrement et annuellement ses états financiers conformément à la législation en vigueur ?

A cette dernière question, à ce jour, je n’en connais pas un. Il est fort probable que les partis politiques congolais recourent à des pratiques financières occultes pour financer leur administration et leurs activités politiques, et par conséquent, ils violent manifestement les lois de la République.

En sus, la cotisation des membres n’est pas le seul moyen de recourir au public pour récolter les revenus. ll en existe plusieurs comme le fundraising ou crowdfunding. L’exemple le plus brillant, à ce jour, au Congo, est la collecte de fonds organisée en l’honneur de Rossy Mukendi, notre martyr de la liberté. En moins de 72 heures, l’initiatrice du projet avait pu récolter plus de 20.000$(vingt mille dollars américains).

D’autres initiatives similaires ont été organisées par la Lucha (Lutte pour le Changement) pour venir en aide aux naufragés de Kalehe. Dernièrement, une brillante femme Cybelle Kamba Kabasu, sur Twitter, a emboîté le pas en récoltant, via les services de monnaie virtuel des entreprises de télécommunication, des aides au profit nos frères de Mai-Ndombe.

Au regard des dispositions légales, du petit calcul marginal développé ci-haut et des différentes initiatives développées par le passé, un parti politique qui justifierait ses faiblesses de récolte des fonds en public, nonobstant l’autorisation du législateur et un foisonnement d’initiative mis à sa disposition, est un parti politique qui vise le court terme, et est plutôt centré à la satisfaction du tube digestif de ses leaders tribaux que par le bien-être général.

La loi nous accorde une possibilité inouïe d’enfler les caisses des partis politiques certes, mais, il nous revient de réfléchir sur d’autres paradigmes, en quittant les sentiers battus, pour aider les partis politiques à devenir des structures patriotiquement techniques et organisationnelles.

Tant que les partis politiques attendent gracieusement et piteusement le financement public, il est fort plausible que leurs dirigeants seront enclins à la corruption au détriment des valeurs républicaines, et seront aptes à trahir la cause du parti pour assouvir leur appétit glouton.

En somme, à mes frères qui crient sur la toile sans contribuer aux caisses de leurs partis respectifs, je n’ai pas d’autres mots : vos bruits ne vont jamais se transformer en richesse, merci de vous déconnecter ne fût-ce qu’un seul jour et remettez un dollar par mois à votre parti politique en tout exigeant que ce dernier publie la source de tous ses autres revenus en se conformant à la législation en vigueur. En y faisant ainsi, je peux vous assurer que de cette façon votre parti pourra passer aisément l’épreuve de la corrosion du temps.

Il est temps que le débat sur financement des partis politiques soit organisé. Je crains que ces partis politiques deviennent des structures occultes qui blanchissent et/ou noircissent de l’argent.

 

Nul n’est au-dessus des lois de la République, dit-on !

Papy Maotela M. Kamangu

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Sud-Kivu : 17 civils massacrés par la coalition RDF-AFC/M23, l’armée dénonce un « pogrom »

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Les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) ont dénoncé, dans un communiqué publié ce lundi 23 juin, le massacre de 17 civils survenu la veille, dimanche, dans le village de Munzinzi, territoire de Walungu, province du Sud-Kivu.

Selon l’armée congolaise, l’attaque a été perpétrée vers 18h30 par les rebelles de la coalition RDF–AFC/M23. Outre les morts, plusieurs habitations ont été incendiées, contraignant des dizaines d’habitants à fuir dans la panique vers les camps militaires pour se réfugier.

« La population a été accusée de collaboration avec les Forces armées et les Wazalendo par l’ennemi, après les échecs cuisants et les lourdes pertes qu’il a subis en tentant d’attaquer les positions des forces loyalistes. Les FARDC condamnent ce énième pogrom et appellent la population à la vigilance », déclare le communiqué signé par le général-major Ekenge Bomusa Efomi.

Le haut gradé rassure que les FARDC poursuivront leurs efforts pour protéger les civils et combattre les violences imposées par les groupes armés dans l’Est du pays.

WTK/CONGOPROFOND.NET

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